Lettre à une morte 1

Publié le par Lotje_a

Ma très chère Marie,

 

Je me trouve dans l’obligation de te dire ce qui m’est arrivé car « une larme de vérité a beaucoup plus de valeur qu’un rire hypocrite », c’est toi-même qui l’a dit. Pourtant,  je me demande si cette vérité vaut la peine d’être sue,  car ce qui en découle n’est que souffrance et amertume auxquelles s’ajoute une petite pointe d’amour profond.

L’amour… Sur ce sentiment inconnu dont le mystère et la tendresse m’obsèdent j’hésite à apposer le nom, le beau nom mystique d’amour. C’est un sentiment si complet d’union entre deux êtres, mais également si égoïste que j’en ai presque honte, alors que l’amour… l’amour m’a toujours paru un sentiment profond tout à fait honorable. Pourtant,  j’en ai honte.  J’ai honte d’éprouver de l’amour alors que je venais de perdre mes parents.  Je ne connaissais pas l’amour, mais la tristesse, la solitude, le regret, plus rarement le remords. Cette nuit-là, quelque chose s’est replié sur moi. Quelque chose d’aussi doux et enivrant que la soie m’enveloppe  et m’unit à tout jamais à cet homme.

Cet automne-là, j’avais 21 ans, toujours pas mariée en plus, mais j’étais tout à fait heureuse. Les « autres », étaient mes proches : mes parents… morts ! Ma mère fut emportée par la maladie,  et mon père mourut de chagrin à peine un mois plus tard. Moi, je suis restée sur le pavé, toute seule. J’étais une orpheline sans rien à part ma pureté d’esprit. Les « autres », c’était ça : des morts. Désormais, j’étais seule au monde, j’étais seule, tellement seule…

Je me souviens de ce soir-là. Le soir de la mort de mon père, j’errais dans les rues de Paris. Je fuyais la maison, la tristesse et surtout la réalité. Je ne voulus plus croire en la mort des « autres », de ma mère, de mon père. Je ne voulus pas être seule, si seule. L’orage éclata alors que je me trouvais dans un labyrinthe de petites ruelles. J’étais en colère, et cet orage exprimait mon courroux. Le tonnerre gronda tout près et exprimait les cris désespérés de mon cœur, de mon âme. Les éclairs illustraient la violence de mon courroux, et ils m’indiquaient également quel chemin suivre… Bientôt, je me retrouvais en face de l’opéra de Paris, là où j’avais partagé l’amour de la musique avec mes défunts parents. Un torrent de souvenirs m’envahissait, la tristesse m’enveloppa. C’est alors que je pris conscience de la pluie, j’étais toute trompée. Mes habits me collaient à la peau et ne laissaient rien à l’imagination de cet homme dans l’ombre…

Il était là dans l’ombre. Il possédait un corps rude, musclé ; de beaux yeux verts, faisant penser aux prairies du Nouveau Monde, brillant de malice ; une peau blanche telle de la neige immaculée ; des dents d’ivoire, des lèvres fines et sensuelles, et une longue et magnifique chevelure couleur châtain. J’avais l’impression de me retrouver en face d’une fée, d’un être supérieur à moi. Je restais plantée là, au milieu de la rue, en face de l’opéra de Paris, et cet homme féerique, venu de l’autre monde. J’étais comme hypnotisée par ses beaux yeux verts, … par son allure féerique…

Je sus tout de suite que cet homme, cette fée représentait ma destinée. Nos vies, nos âmes, nos cœurs étaient liés, même si nous étions encore des étrangers l’un pour l’autre… C’est alors que je pris conscience qu’il m’observait, tout comme moi, je l’observais.  Puis, plus vite qu’un éclair, plus rapide que le coup de foudre même, il vint vers moi. Il me tint dans ses bras, voulut m’embrasser… Je tenais mes lèvres vers sa bouche affamée, mais il me montra l’endroit de son désir : mon cou…

À l’instant même qu’il voulut m’embrasser, me donner son baiser fatal, l’opéra était terminé… Les gens sortaient de tout part, et bientôt, nous fûmes séparés par la foule… J’avais l’impression de me retrouver au milieu d’une fourmilière, perdue au milieu de la foule… Tout le monde rejoignait sa calèche et ne tarda point de partir. Bientôt on n’entendit  plus les bavardages incessants des dames, et les maigres répliques ennuyés des seigneurs, plus que les coups de fouets des cochers, le bruit des roues sur les dalles du boulevard, et les pas marchants des chevaux… Une fois tout le monde parti, je ne tardais à m’apercevoir du fait que mon bel inconnu s’était volatilisé, était parti en me dérobant mon cœur…

Mais qu’ai-je donc fait Dame Solitude, pour que vous me hantiez tant ?

Je me dirigeais alors vers la Seine en quête d’un lieu où dormir. En effet, je n’avais plus de « chez moi », plus où aller dormir. Les créanciers avaient mis la main sur toutes les possessions de ma famille le même jour, le jour de la mort de mon père. J’étais seule au monde, sans même avoir un toit au dessus de la tête. En longeant la rive droite de la Seine,  je finis par trouver une place où dormir sous un pont. Vers trois heures du matin, je finis par trouver le sommeil, bercée par le cliquetis de l’eau…

Aux premières lueurs de l’aube, je me réveillais. Je fus éblouie par la beauté de ce spectacle matinal. Ceci dit, je ne savais même pas que ça allait être le dernier… Le dernier jusqu’à l’arrivée du cinéma en couleur… C’est une magnifique invention du XXe siècle, que tu n’as pas eu la chance de connaître malheureusement ; mais revenons-en à cette vérité que j’ai à te dévoiler…

C’était donc l’aurore semant l’or et l’ivoire à l’horizon qui m’éveilla. De ma cachette sous le pont, je vis l’azur de la Seine pollué par la France et ses cadavres… Je contemplais le Soleil. Je vis cet astre doré commencer son oblique tour. Si j’avais été égyptienne, j’aurais cru voir Ra se lever avec son majestueux char en or, Ra, parti éclairer le monde pour ses loyaux sujets. J’aurais cru voir ses divins chevaux couverts de flammes et de clarté galoper le long de l’horizon, de l’Est à l’Ouest. Ô quel beau spectacle, n’est-ce pas, un levé de soleil !

Déjà, l’enfant de la rue est éveillé et erre dans les rues de Paris à la recherche de quoi manger. J’étais seule à présent, entourée d’un monde hypocrite et cruel que je connaissais à peine. Pour la première fois, je compris ces enfants obligés de voler pour pouvoir manger… Au  loin, mais plus proche qu’il ne paraît ;  j’entendis des oiseaux à un noir ramage,  ces corbeaux avec leurs chants affamés au dessus de la ville à la recherche de quelque mort à emporter…

Une confuse violence troubla ma pensée… J’avais faim et mon ventre vide grondait pour me le faire savoir. Bientôt j’errais dans les rues à mon tour à la recherche de quelques mets à me mettre sous la dent. Malheureusement, je n’avais de sou, je ne pouvais payer. J’errais dans les rues de Paris, le ventre vide.

Je contemplais Paris comme si je ne l’avais encore jamais vu : tous ces beaux bâtiments d’éternelle structure, beaux parcs et beaux jardins de la nature gardant toutes les splendeurs des fleurs et des ombrages verts. Certaines langues bien pendues disent qu’un certain Démon y rôde afin de défendre aux hivers d’en effacer jamais la belle et majestueuse peinture. Voyez ces dignes demeures de Rois à la divine architecture en cette Paris joyeuse et libertine…

Je finis par atteindre la cathédrale de Paris, la Notre-Dame au sein de laquelle je me refugiais pour prier pour le bien-être de mes parents dans l’au-delà.  Je ne cessais de prier qu’à la fin de la journée. J’étais toute raide à être restée assise ainsi toute la journée. En effet, toute la journée, j’ai passé devant la croix, agenouillée humblement devant la croix… En me levant,  je vacillais.  Je finis toutefois par atteindre dignement les pores de la cathédrale, et je sortis retrouver ma cachette. Mais auparavant,  je partis retrouver l’opéra, espérant revoir mon sort surgir devant moi.

Tout ce temps déjà,  ma très chère Marie,  je semblais t’avoir oubliée.  Je ne t’avais point oubliée, ma très chère amie,  mais je ne voulais point abuser de ton si légendaire gentillesse.  Je savais que toi et ton époux avaient déjà du mal à joindre les 2 bouts à la fin des mois, alors… Bien que la tentation ne manquait pas de t’informer de ma situation miséreuse.  Je ne voulais pas que tu me prennes en pitié, alors, j’ai décidé de quitter voter vie au risque de te faire de la peine. Je t’ai laissée un mot, mais pas d’adresse.  Je t’ai dit que ma tante m’avait amenée avec elle.  Je t’ai mentie ma très chère Marie. Bien que j’aie quelques tantes, je n’en ai point qui veuille bien me reconnaître. Je n’existe pas pour elles,  je ne suis qu’une simple erreur. Alors, ma très chère amie, je me suis retrouvée toute seule sur le pavé,  jusqu’à ce que…

Le crépuscule enveloppait la ville de l’amour, la ville des romances, Paris, lorsque je passais devant l’opéra… Je restais dans l’ombre, cachée aux yeux de tous, mais bien visibles pour ses beaux yeux d’une verdure sans pareille. Lorsqu’enfin, il arriva, la nuit noire, il vint vers moi et me dit d’une voix rauque : 

    «  - Vous vous êtes perdue gente demoiselle ?

        - Nullement, beau chevalier nocturne, je vous attendais.

C’e  - C'est que vous faites erreur alors.

Nul  - Nullement encore une fois. Je suis seule au monde, et je sais – veuillez me pardonner mon manque de retenue – que vous êtes ma destinée.

V      - Voulez-vous donc une destinée sombre et sans fin ?

R      - Rester à vos côtés, ensemble à tout jamais ; c’est tout ce qui compte à mes yeux. »

Sur quoi, il me reprit dans ses bras. Il voulut pourtant me repousser sans jamais y parvenir.  Dans son regard,  je lus une violence inouïe. L’espoir et le désespoir traversaient son visage.  Il était perdu dans les tourments de son âme…

Je fermis les yeux, frémis à l’idée de ce qu’il pourrait arriver à l’insu de son combat intérieur… Je sentis qu’il éprouvait des sentiments pour moi, mais qu’en même temps, il ne voulait me faire souffrir. Mais, moi, tout ce que je voulais était de rester à ses côtés… Rester à ses côtés jusqu’à la fin de ma vie,  jusqu’à la fin de mes jours…

Après quelques minutes, je rouvris mes yeux, et vis qu’il n’était plus là. J’avais senti un vague froissement de ses vêtements contre les miens, mais je n’ai pas voulu croire dans le fait qu’il s’était volatilisé encore une fois.  Je ne voulais pas croire que j’étais toute seule à nouveau, je ne voulais pas croire…

A nouveau,  je me mettais à courir afin de fuir la réalité d’être laissée pour compte, toute seule dans la grande ville de Paris.  Je ne faisais gaffe où j’allais, et bientôt, au plus haut de ma stupeur,  je découvris que j’étais dans les bas-fonds de Paris. C’est un de ses quartiers sensibles pour lequel, mon père, et ton mari m’avaient tant prévenu ! C’est alors, que je ralentissais, afin de faire attention,  sentir si j’étais suivie ou non, et … Non, on ne me suivit pas, mais au carrefour, trois hommes sortaient d’une taverne, ils venaient d’être jeté à la rue par le patron. Ils étaient en colère, et décidèrent de se venger sur moi…

Ils me suivaient, je me remis à courir, j’arrivais même à atteindre l’opéra, désert à cette heure-là. C’est alors, qu’ils me rattrapèrent, qu’ils me jetèrent par terre. Ils ne tardèrent à me déchirer mon corsage, à me relever mes jupons. L’un d’eux demanda aux autres de bien me tenir par terre, et commença à déboutonner son pantalon. Là, j’eus une peur bleue,  j’ai eu la trouille de ma vie. En voyant son sexe se rapprocher de mon entre-jambe, je commençais à hurler, et à hurler. J’essayais de me débattre, mais su très bien au fond de moi que je ne pourrais rien faire,  j’étais bien trop faible pour résister à la force de trois hommes.

Je fermai encore une fois les yeux. J’avais peur de ce qui pourrait m’arriver, je n’arrêtais pas de me battre, de jeter mes bras et mes jambes dans n’importe quel sens afin d’essayer de faire du mal aux hommes qui me tenaient par terre… C’est alors que tout d’un coup,  je sentis une sorte de voile descendre du ciel. J’ouvris mes yeux, et vis mon fée sombre descendre du ciel, vêtu de noir, et d’une cape rouge.  Son visage était transformé de rage ! C’est alors, que je tombais dans l’inconscient.

Tout doucement,  je repris conscience,  mon fée, était penchée sur moi. Je ne me trouvais plus dans la rue,  mais dans un lit dans une chambre réchauffée par un feu dans une cheminée. J’ouvris mes yeux grandement, et il souriait en me disant :

         - « Ah, gente demoiselle, vous voilà qui reprenez conscience. Enfin, vous retrouvez les esprits. Mais que faisiez-vous là donc, ainsi, au milieu d’un tas de brigands d’une cruauté sans scrupules ?

         - Ah, monseigneur, lorsque vous m’avez laissée sur le pavé, je me suis mise à courir. Je ne peux supporter l’idée d’être seule au monde, or j’ai eu la naïveté, de croire que vous voudriez bien me prendre avec vous.

          - Mais pourquoi donc, avez-vous donc pensé une telle chose ? 

          - Il y avait quelque chose dans votre regard qui exprimait les mêmes sentiments que j’éprouvais, moi, dans mon coin de solitude.

          - Hmm… »

Il ne voulait décidément pas me raconter ce qu’il éprouvait réellement. Je décidais de ne pas l’importuner plus longuement, et continuais :

          - « Monseigneur, j’ai couru, j’ai couru à travers tout Paris, et par malchance, j’ai atteint les bas-fonds de cette majestueuse ville. C’est alors, que j’ai rencontré ces trois brigands. Je me suis enfuie, je me suis retrouvée devant l’opéra lorsque je ne pus fuir plus longtemps, ils me rattrapèrent, et vous avez pu constater la suite…

          - Ma très chère, que faire de vous à présent ?

          - Mais, rien monseigneur, je ne vous importunerais pas plus longtemps, je m’en irai, ne vous inquiétez pas.

          - Mais, où allez vous aller ma chère demoiselle ?

          - Ô, j’irais où le sort me guidera.

          - Mais, vous avez déjà affirmé que votre sort, était celui de rester à mes côtés.

          - J’y ai cru en effet, à un moment.  Mais à présent,  j’ai ouvert les yeux, et j’ai vu que je ne faisais que vous ennuyer avec mes histoires. Je vais m’en aller à présent, et vous laisserai tranquille à tout jamais. »

Je voulus me lever, et m’en aller, mais une fois arrivée à la porte, il me retint, en me disant :

          - « Vous voulez restez, à tout jamais à mes côtés, vraiment, à tout jamais.

          - Oui, je le voudrais monseigneur,  si je ne vous importunerais point.  Mais,  je vois très bien, que je en serais qu’une charge de plus pour vous, or je ne voudrais être un fardeau pour vous, donc, je suis prête à quitter votre vie à tout jamais.

          - Je dois avouer que je vous trouve être une compagne agréable ; alors, je vous laisse le choix. Soit, vous restez ici, et je vous embrasse, et vous resterez à tout jamais à mes côtés. Soit, vous partez par cette porte, je vous donnerai tout ce que je pourrai vous offrir  afin que vous viviez heureux.

          - Que voulez-vous dire par là ?

          - Soit, vous partageriez ma misérable existence à tout jamais, soit, vous seriez heureux jusqu’à la fin de vos jours.

          - Je choisis de rester à vos côtés à tout jamais monseigneur. »

Répondis-je en revenant sur mes pas. Je me mis à ses côtés, et lui offris l’objet de son désir. Mais, il la refusa.  Il me dit :

          - « Je préférerais rapporter cela à demain. Entretemps, je préférerais que vous alliez vous coucher, demain, il vous faudra faire des courses, acheter une toute nouvelle garde-robe.

          - Vous viendrez avec moi, j’espère ?

          - Non, je ne pourrai pas malheureusement, mais je suis certain que vous vous en sortirez toute seule.

          - Mais mais, jamais je ne saurai quoi acheter. En plus, comment pourrais-je vous rembourser ?

          - En restant à mes côtés pour toujours.

          - Mais ?

          - Arrêtez de poser des questions inutiles, tout ce qu’il vous faut savoir, c’est que j’aimerais vous voir dans de belles robes, n’importe quel en soit le prix.

          - D’accord monseigneur ! »

Ma chère Marie, tu te demandes peut-être pourquoi je te fais part de tant de discussions, mais il me faut te les raconter, car ils dévoilent plus sur la personnalité de mon seigneur, que n’importe de ce que je pourrais te raconter sur lui. Ici, en particulier, il dévoile bien son caractère généreux. Ô, je ne peux te dire avec des mots à quel point, j’ai été surprise, stupéfait même par sa générosité. Mais continuons à présent, j’ai encore tant à te raconter, à te dire…

Le lendemain matin, je me retrouvais toute seule dans la chambre dans laquelle il m’eut amenée. Cependant, il m’a laissé un mot sur mon chevet qui me dit :

« Allez dans la boutique de Madame Belle-Fleur,  elle fait de très belles robes, vous y trouverez votre compte. Tout est déjà payé d’avance, vous n’avez plus qu’à choisir. »

Un petit-déjeuner était préparé pour mon égard, je ne tardais à en profiter, tout en léchant par gourmandise mon assiette si bien garnie… Après quoi,  je ne tardais à faire ma toilette, afin de descendre demander à la patronne de l’auberge où se trouvait cette fameuse boutique que je ne connaissais point. Heureusement pour moi,  je ne tardais à découvrir qu’elle ne se trouvait qu’à la fin de la rue. Aussi, arrivais-je assez tôt dans la boutique, qui ne tardait à fermer derrière moi.  Je ne compris pourquoi Madame Belle- Fleur ferma sa boutique derrière moi, mais elle ne tardait à m’en informer de la raison.

          - « Ô, ma chère demoiselle, comme monsieur nous a dit, vous êtes très belle. Il m’a demandé expressément, de ne me préoccuper que de vous. Il m’en a donné une forte belle somme pour, alors, je préfère que nous restions seules afin de choisir vos tenues diverses et variées.

          - Mais ?

          - Ô, il ne vous en a pas encore parlé, ô là là, les jeunes couples mariés…

          - Mais…

          - Ne vous inquiétez pas ma très chère, tout a déjà été réglé, il ne vous reste plus qu’à choisir les modèles et les couleurs.

           - Je crois que vous sauriez mieux choisir que moi mes tenues. je ne sais pas vraiment ce que monsieur attend de moi.

           - Il attend de vous d’être belle, très belle. Malheureusement, même dans mon métier de couturière,  je dois avouer, que je n’ai point vu de femme aussi belle que vous, même nue, vous seriez la plus belle femme de France.  Mais, allons, venez, je vais vous montrer quelques modèles. »

Elle était très gentille pour moi cette Madame Belle-Fleur. SI tu as eu l’occasion d’y aller au moins une fois dans la vie, je serais très contente pour toi. Elle vaut la peine d’être connue Madame Belle-Fleur. Mais, bon il me faut encore décrire les créations que j’ai pu acheter pour me faire belle… Mais incapable de trouver des mots afin de décrire les robes, les belles créations, je préfère te passer quelques croquis que j’ai pu recevoir de la part de Mme Belle-Fleur.

(malheureusement, je n'ai pas encore résusi à les mettre en ligne...)

Il me faut te dire que celle-ci est ma préférée.

Celle-ci je la porte souvent pour des bals, et des sortie à l’opéra…

Une autre adaptée pour les bals…

Je n’en ai pas eu d’autres en dessin, mais avec celles-là, tu peux très bien imaginer les autres créations magnifiques que j’ai pu recevoir de sa part… En rentrant à l’auberge, je portais celle que tu as vue sur le premier dessin…

En rentrant à l’auberge, il commença à faire de plus en plus sombre, alors, une fois rentrée, l’aubergiste me dit :

          - « Oh, que vous êtes jolie avec cotre nouvelle robe mademoiselle, monsieur va être content. Allez-y, il vous attend en haut pour manger.

          - Merci monsieur, j’y cours tout de suite ! »

Ce que je fis empressement, je ne savais pas s’il m’accorderait un dernier dîner sur cette terre, ou s’il préfèrerait me délivrer de cette vie une fois pour toutes immédiatement lorsque j’aurais passé le seuil de la chambre.

J’entrais dans la chambre, et la première chose que je vis était cette table bien garnie au milieu de la pièce. Hmm, rien que le fait d’y penser me fait couler l’eau dans la bouche… La porte se referma derrière moi : il était là.

Une silhouette élancée passa derrière moi, murmura à mon oreille :

          - « Mange ma belle. Il te faudra des forces afin de passer la dernière épreuve.

          - Mais ? 

          - Mange, on verra le reste après. Profite de ton dernier repas en tant qu’être mortel. »

Goulument, je me mis  à manger avec beaucoup d’appétit, une fois ma faim apaisée, je levais mon regard vers lui. Il était assis à l’autre bout de la table, un sourire aux lèvres. Mes yeux plongés dans les siennes, je vis son regard allant d’un vert clair au vert foncé. J’avais l’impression de me retrouver dans une forêt amazonienne, ou une forêt du nouveau monde.

Puis, avant que je sus ce qui m’arriva, il se tint derrière moi, prit mon visage doucement entre ses mains, et me dit :

           - « Reste tranquille ma belle, ce sera fini dans moins d’une minute. »

Je le regardais une dernière fois en tant que mortelle, puis je lui tendis mon cou, avec amour, avec reconnaissance, avec joie, et bien sûr une certaine appréhension. Je ne savais pas comment ça allait se passer, ce que j’allais ressentir. Pourtant, j’avais confiance en lui. Je savais qu’il ne voulait pas me faire du mal, mais qu’il voulait m’aider.

Ô chère Marie, je sais que cette lettre peut sembler être extrêmement longue, mais tu me connais, je n’ai jamais été douée pour m’arrêter dans mon élan. J’ai écrit ces histoires desquels je t’ai parlé. Je les ai écrits, car c’est toi qui a dit que je ne les finirai jamais. J’ai voulu te montrer ton tord. J’ai bel et bien fini ces histoires orageuses.

La première fois qu’il m’a embrassé réellement, c’était ce soir là.

Avant de m’embrasser, il me dit :

          - « Es-tu bien sûr de vouloir ce baiser, ce baiser d’amour mortel ?

          - Oui, je le veux.

          - Es-tu consciente que par ce baiser, tu abandonneras pour toujours la lumière du jour, la vie humaine ?

          - Oui, je le sais, et je le veux.

          - Alors, appelle-moi : Charles.

          - Charles… »

Dis-je comme si je dégustais ce merveilleux nom. Il me prit alors dans ses bras, je tournais ma tête en arrière afin de libérer mon cou, afin qu’il puisse me donner sans aucun problème son baiser immortel.  Je ne le vis pas, penché sur moi, je vis seulement la chambre tourner autour de moi lorsque je sentis sa bouche froide, cette bouche pourtant si sensuelle qu’elle aurait dû être brulante d’une fièvre amoureuse. Je sentis sa bouche froide se poser sur mon cou que je lui offris gracieusement. Il m’embrassa goulument ce qui me détendit, ce qui me réchauffa par la tension sensuelle qui régna entre nous,  dans cette pièce… Puis, tout d’un coup, sans signe préventif, il enfonça ses dents dans ma gorge. J’avais alors l’impression de brûler,  j’avais tellement mal que je crus être portée jusqu’à la potence. Je crus que j’allais mourir…

Je perdis connaissance.

Marie, as-tu déjà pensé à la mort ? Sans doute non, même si tu es décédée il y a des années de cela... Personne ne pense à la mort.  Personne,  à part moi.  Je préfère donner ma vie par amour, afin de vivre éternellement aux côtés de celui que j’aime.  Mais était-ce de l’amour pure, ou n’était-ce simplement dû au fait que je n’avais plus personne dans ce monde. Mes tantes ne voulaient point de moi, et toi, je ne pouvais te demander en aide. Tu avais déjà tant de travail avec ton époux et tes enfants… Je n’avais le droit de m’imposer chez vous sans rien, avec seulement des usuriers qui me poursuivaient.

Je repris connaissance quelques minutes après, je souffrais encore la martyre, je n’étais pas encore entièrement transformée. Il se tenait de l’autre bout de la chambre, il ne voulut s’approcher de moi. Il semblait terrifié  par ce qu’il avait fait…

Quelques heures plus tard,  j’étais enfin transformée.  J’avais passé un certain purgatoire en souffrant le martyr avant d’être enfin devenue une « peau froide », un « être supérieur » à la race humaine…

 

Chère Marie, je te laisse ici, à la fin de cette lettre, j’ai encore tellement de choses à te dire, mais cela attendra une autre lettre que je ne tarderais pas à écrire…

Avec toute mon amitié qui persiste dans mon cœur, malgré le temps qui écoule, qui s’est écoulé trop hâtivement pour toi, et qui continue à s’écouler à tout jamais pour moi…

Isabelle

 

Publié dans lettres

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B
<br /> Si je puis me permettre, ton texte est trop long pour être lu d'une seule traite sur un blog.<br /> Tu pourrais le publier en plusieurs épisodes et interesser plus de lecteurs.<br /> <br /> Bises et bonne journée<br /> <br /> <br />
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L
<br /> Merci pour l'idée, je m'y mets dés ce soir; à voir en combien de parties distinctes je peux diviser ma lettre...<br /> Merci beaucoup pour cette astuces.<br /> Bisous, et bonne journée à vous<br /> <br /> <br />